Offre de stage de master : Microscopie optique des microbes de l’enfer
Au cours de milliards d’années, la vie sur Terre a évolué pour s’adapter à une grande variété de conditions environnementales, parfois considérées comme extrêmes du point de vue humain. En particulier, certains micro-organismes procaryotes (bactéries, archées) peuvent se développer à des températures extrêmes, allant jusqu’à 122 °C [1]. Ces hyper-thermophiles vivent dans divers écosystèmes tels que les cheminées hydrothermales océaniques profondes, les sources chaudes ou les sites volcaniques.
Malgré leur intérêt sur le plan fondamental ou appliqué, seule une minorité de ces thermophiles sont étudiés en détail car on ne sait pas cultiver la majorité. On estime à moins de 1% la fraction accessible en culture axénique par les méthodes traditionnelles. C’est d’autant plus vrai pour les thermophiles dont la nature même complique les efforts pour recréer au laboratoire les conditions propices à leur croissance (température élevée, acidité, anaérobiose, gradients…). L’immense majorité n’est identifiée que par les méthodes moléculaires.
La microscopie reste un outil incomparable pour étudier la physiologie des micro-organismes in- vitro à l’échelle cellulaire mais n’est pas simple à mettre en œuvre quand il s’agit d’hyperthermophiles. L’observation de thermophiles actifs in-vitro ne peut être effectuée sur aucun microscope optique standard, même équipé de chambres de chauffage disponibles sur le marché, qui ne sont généralement pas conçues pour dépasser 40 °C.
Récemment l’institut Fresnel a développé un dispositif de chauffage laser à la micro-échelle sur le champ de vision d’un microscope afin d’atteindre une température élevée pour l’étude des thermophiles [2]. Cette méthode a été validée sur des souches aérobies hétérotrophes, et jusqu’à une température de 80°C. Il a été ainsi possible de voir pour la première fois des thermophiles croitre, nager, germiner, et se diviser sous le champ de vue d’un microscope.
Le stage consistera à prendre la suite de ces travaux en étudiant des souches anaérobies, et à des températures allant jusqu’ 113°C. Pour relever ce défi, de nouveaux circuits microfluidiques seront utilisés pour accueillir les cultures de bactéries, qui permettront de contrôler la présence des gaz dissouts et d’éliminer toute trace d’oxygène, toxique pour ces micro-organismes anaérobies. Ces circuits seront placés sur un microscope optique couplé avec un laser de chauffage et une caméra thermique. Le (la) stagiaire participera à la fabrication des puces microfluidiques, cultivera les bactéries, effectuera les expériences de microscopie optique, et traitera les images/vidéos obtenues.
Ces travaux seront réalisés à l’institut Fresnel, à Marseille, un laboratoire spécialisé en optique, et microscopie pour la biologie. Le projet sera mené en étroite collaboration avec l’institut méditerranéen d’océanographie (MIO), également à Marseille, spécialisé dans l’étude d’organismes hyperthermophiles.
[1] Microbes de l’enfer, Patrick Forterre, Belin, Pour la Science (2007)[2] Life at high temperature observed in vitro upon laser heating of gold nanoparticles, C. Molinaro,
M. Bénéfice, A. Gorlas, V. Da Cunha, H. M. L. Robert, R. Catchpole, L. Gallais, P. Forterre, G. Baffou,
Nature Communications 13, 5342 (2022)